L’étiquetage des denrées alimentaires dans l’Union Européenne : que dit le rapport de la Cour des comptes européenne ?
Communication nutrition-santé
Fin novembre, la Cour des comptes européenne a publié un rapport spécial sur l’étiquetage des denrées alimentaires dans l’UE, une première en la matière.
Ces travaux visaient notamment à évaluer si les informations figurant sur les étiquettes alimentaires aidaient ou non les consommateurs à faire des choix éclairés lors de leurs achats.
Le rapport révèle que le cadre juridique de l’UE offre globalement les informations essentielles nécessaires pour guider les consommateurs dans leurs choix alimentaires. Cependant, des retards et des lacunes dans la mise à jour de ce cadre limitent encore la capacité des citoyens à prendre des décisions pleinement éclairées (travaux achevés dans 4 domaines sur les 11 domaines d’actions identifiés).
Les constats de la cour des comptes
Ce qui a été réalisé :
- Acides gras trans : Depuis 2019, un règlement fixe une quantité maximale autorisée dans les denrées alimentaires.
- Présence de gluten : Publication d’un acte d’exécution concernant les mentions qui peuvent être utilisées pour les denrées alimentaires qui conviennent aux personnes souffrant d’une intolérance au gluten, telles que « sans gluten » ou « très faible teneur en gluten »),
- Pays d’origine : Publication de règles (en 2013 et 2018) concernant l’indication obligatoire de l’origine pour certains produits, et des systèmes nationaux spécifiques existent dans sept États membres.
- Boissons alcoolisées : Plusieurs initiatives, notamment des protocoles d’accords signés en 2019 pour l’étiquetage nutritionnel et la liste des ingrédients dans les secteurs de la bière et des spiritueux et en 2021 avec la publication d’un règlement imposant l’inclusion d’une déclaration nutritionnelle et d’une liste des ingrédients pour les produits vinicoles aromatisés ainsi que des initiatives de plusieurs états membres en matière d‘étiquetage des boissons alcoolisées
Ce qui est en cours :
- Allégations de santé : Plus de 2 000 allégations botaniques sont toujours en attente de validation.
- Profils nutritionnels : Absence de cadre réglementaire pour interdire les allégations sur des produits trop gras, trop sucrés et/ou trop salés.
- Étiquetage nutritionnel sur la face avant : Un consensus européen sur un système harmonisé reste à trouver.
- Étiquetage préventif des allergènes : Pas de règles harmonisées dans ce domaine.
Domaines pour lesquels aucune action n'a été entreprise à ce jour :
- Lisibilité : la commission devait établir des règles de lisibilité via des actes délégués en vertu du règlement INCO
- Denrées pour végétariens ou végétaliens : Pas de définition harmonisée ni de critères d’acceptabilité d’un produit pour les végétariens ou végétaliens de type seuils pour les traces de produits d’origine animale
- Apports de référence pour des populations spécifiques : Les apports de référence sont limités aux adultes et aux jeunes enfants pour les vitamines et minéraux.
Conséquences pour les consommateurs
Ces lacunes impactent directement les consommateurs, qui n’ont pas accès aux mêmes informations en fonction des États membres (du fait de règles nationales mises en place dans l’attente d’une réglementation européenne) .
Le rapport souligne également certaines pratiques commerciales trompeuses, comme l’utilisation de termes non certifiés (« naturel », « frais ») ou la mise en avant d’ingrédients présents seulement sous forme d’arômes.
En outre :
- Les attentes et la compréhension des consommateurs en matière d’étiquetage ne sont pas suffisamment analysées. Il n’est donc pas possible de déterminer si les consommateurs sont correctement informés ou si leurs attentes sont satisfaites.
- Les consommateurs trouvent parfois le système d’étiquetage des denrées alimentaires de l’UE compliqué (ex : sur les dates de consommation).
- Les systèmes de contrôle nationaux, bien que présents (via des contrôles annuels et des plans de contrôles nationaux pluriannuels), sont parfois complexes. De ce fait, ils peuvent manquer d’efficience ou présenter des lacunes.
- Les sanctions appliquées en cas de non-respect des règles ne sont pas toujours dissuasives, efficaces ou proportionnées
Recommandations et réponses de la Commission européenne
Pour pallier à ces manquements, la Cour des comptes européenne a formulé cinq recommandations à la Commission européenne, à mettre en œuvre d’ici 2027 :
- Combler les lacunes du cadre juridique de l’UE relatif à l’étiquetage des denrées alimentaires
- Approfondir l’analyse des pratiques en matière d’étiquetage
- Vérifier quelles sont les attentes de consommateurs et prendre des mesures afin qu’ils puissent mieux comprendre l’étiquetage des denrées alimentaires
- Renforcer les contrôles auxquels les États membres doivent soumettre les labels volontaires et le commerce de détail en ligne
- Améliorer la communication d’informations sur l’étiquetage des denrées alimentaires
La Commission européenne a accepté ces recommandations dans une réponse au rapport spécial de la cour des comptes et s’engage à les appliquer dans les délais proposés par la cour des comptes.
Conclusion
Selon la cour des comptes : « L’étiquetage des denrées alimentaires dans l’UE peut aider les consommateurs à prendre des décisions en meilleure connaissance de cause lors de leurs achats alimentaires, mais il existe des lacunes dans le cadre juridique de l’UE, ainsi que des faiblesses au niveau du suivi, de la communication d’informations, des systèmes de contrôles et des sanctions ».