Le HCSP publie ses recommandations pour le futur PNNS 5 : vers un nouveau cadre nutritionnel intégrant santé et durabilité
Communication nutrition-santé
Le 24 juillet dernier, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a publié ses recommandations en vue de l’élaboration du Programme National Nutrition Santé 5 (PNNS 5). Les conclusions sont claires : le PNNS doit évoluer pour répondre aux enjeux actuels de santé publique et de durabilité.

Une refonte stratégique du PNNS
Le HCSP propose de repenser le cadre stratégique du PNNS, à commencer par un changement de nom, pour refléter des ambitions élargies :
- Intégration de la durabilité environnementale,
- Inclusion du sommeil comme déterminant de santé,
- Renforcement du rôle central de l’activité physique dans la lutte contre la sédentarité.
Les premières conclusions du PNNS 4 sont quelques peu mitigées : fondé sur des engagements principalement volontaires, il a eu peu d’impact sur l’offre alimentaire. Le HCSP recommande donc d’introduire des leviers plus contraignants.
Les axes prioritaires identifiés
Cinq grands enjeux de santé publique sont à renforcer selon le HCSP :
- Promouvoir des modes de vie actifs incluant sommeil, et activité physique adaptée à chacun ;
- Encourager des régimes alimentaires sains et durables, en favorisant une alimentation plus végétale et intégrant des critères environnementaux.
- Agir sur l’environnement alimentaire, via un encadrement renforcé du marketing et le passage à des mesures réglementaires.
- Réduire la précarité alimentaire, avec des politiques nutritionnelles plus équitables et inclusives.
- Améliorer la gouvernance et la lisibilité
Quatre thématiques majeures structurent le futur PNNS
Les recommandations du HCSP s’articulent autour de quatre piliers :
- Activité physique
- Comportements sédentaires
- Alimentation
- Sommeil
Focus sur les enjeux de durabilité
Transformer les systèmes alimentaires pour les rendre plus durables nécessite une action à tous les niveaux de la chaîne de valeur. Trois leviers sont identifiés :
- Développer des pratiques agricoles plus durables (agroécologie, réduction des intrants).
- Réduire les pertes et le gaspillage alimentaires.
- Évoluer vers des régimes à dominante végétale, moins riches en produits ultra-transformés.
Les régimes alimentaires doivent évoluer vers une diminution de la viande de près de moitié, une baisse des produits laitiers et vers une augmentation significative de la consommation de produits d’origine végétale en particulier des légumes secs.
Les régimes alimentaires favorables à la santé sont, en général, aussi bénéfiques pour l’environnement. C’est le cas des céréales complètes et des légumes secs, à l’inverse des viandes de ruminants, très impactantes sur le plan environnemental (émissions de Gaz à effet de serre (GES), usage des sols, impact sur la biodiversité).
Recommandations sur les groupes d’aliments
Le HCSP émet des recommandations détaillées sur :
- Viandes et charcuteries : abaisser les seuils de consommation et informer sur les substitutions possibles.
- Produits de la pêche : encourager une consommation raisonnée, tenant compte des impacts écologiques.
- Produits laitiers, produits céréaliers complets, légumes secs, fruits à coque, fruits et légumes : continuer à promouvoir ceux bénéfiques à la fois pour la santé et l’environnement.
- Produits sucrés, ultra-transformés, contaminants : limiter leur consommation et renforcer l’information aux consommateurs.
- Produits bio, de saison : encourager leur consommation. Le HCSP recommande de de retirer la notion de "localisme" des repères nutritionnels, afin d’éviter toute confusion chez les consommateurs quant à l’impact environnemental réel des produits locaux.
Vers un environnement nutritionnel plus favorable
Le HCSP propose également des mesures complémentaires portant sur :
- La publicité et le marketing : en réglementant le marketing et en interdisant la promotion et les communications commerciales sur les produits notés D ou E au Nutri-Score ;
- La fiscalité : accompagner la révision de la taxe sur les boissons sucrées et un élargissement de cette taxe à d’autres produits à faible qualité nutritionnelle ;
- La qualité nutritionnelle : fixation d’objectifs chiffrés de reformulation (sel, sucres, acides gras saturés) avec les industriels sur les secteurs les plus contributeurs en ces nutriments ;
- L’étiquetage nutritionnel : poursuivre la promotion du Nutri-Score et l’étendre au vrac et à la restauration hors foyer ;
- La Lutte contre la précarité alimentaire
- Le soutien à l’allaitement maternel, en cohérence avec le rapport « Allaitement maternel » du HCSP publié en juin 2024
Le HCSP souligne l’importance de repenser le cadre stratégique du PNNS, y compris en le renommant, afin de refléter ses nouvelles priorités : durabilité environnementale, reconnaissance du sommeil comme déterminant de santé, et recentrage sur l’activité physique et la lutte contre la sédentarité.
Actualités récentes
Le PNNS 5, devrait s’inscrire plus largement dans la Stratégie Nationale de l’Alimentation de la Nutrition et Climat (SNANC). Prévue par la loi Climat et Résilience de 2021, cette stratégie visait à rapprocher le Programme National Nutrition Santé (PNNS) et le Programme National pour l’Alimentation (PNA) autour d’une feuille de route commune.
Publié en avril 2025, le premier projet de la SNANC a été soumis à consultation publique entre avril et mai. Ce texte, très attendu depuis juillet 2023, a suscité de nombreuses réactions parmi les parties prenantes. La version définitive était annoncée pour septembre 2025, à l’issue d’arbitrages interministériels. Toutefois, selon des informations ayant fuité, le gouvernement Bayrou aurait modifié le document validé en réunion, supprimant notamment la partie relative à la réduction de la consommation de viande — un point pourtant validé par les ministères de l’Agriculture, de la Santé et de la Transition écologique. À ce jour, la publication officielle de la SNANC reste donc en suspens.
Face à cette situation, plus de 110 organisations ont adressé une lettre ouverte au nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, pour accélérer la mise en œuvre de la stratégie. Elles y formulent plusieurs demandes fortes, parmi lesquelles :
- Interdire la publicité et le marketing pour les produits trop gras, trop sucrés et trop salés, notamment lorsqu’ils ciblent les enfants, et rendre obligatoire l’affichage du Nutri-score sur tous les emballages et les supports publicitaires.
- Fixer une trajectoire chiffrée vers “moins et mieux” de produits animaux d’ici 2030, incluant la réduction de la consommation de viande (y compris volaille et charcuterie), et le soutien aux produits animaux durables d’origine France
- Nommer un ou une déléguée interministérielle chargée de la mise en œuvre et du suivi de la SNANC, garante de l’allocation des moyens nécessaires à l’atteinte de ses objectifs.
Un dossier sensible, au cœur des enjeux de santé publique, de durabilité alimentaire et de compétitivité des filières agroalimentaires. Affaire à suivre…